La notion de hasard utilisée en biologie dans la caractérisation des mutations génétiques a souvent fait l'objet d'analyses d'un point de vue évolutionnaire, c'est-à-dire par rapport à la relation entre mutation, sélection et adaptation, dans le but d'en clarifier la signification. Cependant, les mutations génétiques, comme bien d'autres sources de variation biologique (par exemple, la recombinaison), sont aussi qualifiées d'événements « aléatoires » ou de fruit du « hasard » selon une perspective moléculaire. Quelle est la signification de la notion de hasard invoquée dans ce cadre non évolutionnaire ? Je fournirai une réponse à cette question par l'introduction et la définition des deux notions suivantes : l'« aléatoire (au sens) fort » et l'« aléatoire (au sens) faible ». Les avancées récentes dans l'étude du processus de mutation me permettront de montrer que toute mutation génétique est un événement moléculaire « aléatoire (au sens) faible ». C'est la thèse principale de cet article. Ensuite, je soutiendrai que cette notion peut aussi se révéler appropriée pour parler de certains processus évolutionnaires, notamment la dérive génétique aléatoire qui est un processus de la microévolution. En effet, comme Kimura l'a montré vers la fin des années 1960, la plupart des modifications génétiques sont neutres du point de vue sélectif et sont donc transmises d'une génération à la suivante de manière « aléatoire » ou par « hasard ». Je conclurai par la clarification du statut de la notion d'« aléatoire (au sens) faible » en biologie moléculaire et je suggérerai une nouvelle version de ce concept du point de vue de la théorie de l'évolution.